Les rois de la galette. Ils s’appellent Saga le rasta, Bouba, Youssouf dit “Cymbale”, Souleyman, Max ou Angélique. Leur quotidien consiste à courir après une “galette” qui permet plusieurs “kifs”, à chasser le caillou sans trêve du soir au matin selon le bon vouloir souvent violent du “maudou”, le sacro-saint, l’indispensable dealer. L’auteur, qui parle à la première personne, les rencontre dans le cadre de la préparation d’un documentaire qu’il veut réaliser sur le nord du XVIIIème arrondissement, ce territoire parisien du trafic de crack.
Le jeune reporter d’images n’est pourtant pas dupe de la difficulté de se balader dans cette zone glauque que devient la nuit la porte de la Chapelle, avec une caméra de 3 000 euros à l’épaule et son enthousiasme de journaliste curieux et pugnace. Méfiance, peur, envie, mépris et rouerie sont au programme de ces rendez-vous nocturnes dans les bas-fonds, reflets en creux de la société.
Mais c’est justement le paradoxe de cet émouvant récit, qui sort du traditionnel reportage “choc” grâce au ton empathique du narrateur qui s’effare de constater la lucidité de la plupart des “crackers” mais constate aussi leur détresse et leur incapacité à sortir du monde cauchemardesque où les aplongé la drogue. Un périple social et littéraire – car Jordis a une vraie plume – à côté duquel il serait dommage de passer…
